Pour faire suite au précédent article sur les difficultés sondagières du président sortant, voyons s’il peut être évincé au sein de son camp.
1. Il faut toutefois le répéter en préambule : Hollande sera candidat. La politique et même la pure politique électorale sont sa vie : il n’a jamais rien fait d’autre, n’ayant jamais été ministre et étant resté très peu de temps responsable d’un exécutif local. En outre, il sait que la volatilité de l’électorat s’est accrue et que le temps médiatique est toujours plus rapide et fractionné, autorisant théoriquement des rebonds significatifs et des victoires surprises. Enfin, il ne veut pas rester dans l’histoire comme celui qui aura renoncé.
Il n’en reste pas moins que, comme évoqué dans un précédent article, une érosion sondagière telle qu’elle le situerait au niveau ou en-deçà de Mélenchon et/ou Bayrou pour une longue période de temps poserait réellement la question de sa candidature. Après tout, des cadres du PS pourraient eux-mêmes finir par demander l’application des statuts du PS qui prévoient l’organisation d’une primaire « citoyenne » et ouverte, même en cas de président sortant.
Cet article n’est donc pas forcément de pure spéculation. Quand bien même le serait-il, c’est le plaisir de la « politicaillerie »…
2. Hollande cherche depuis le début à détruire toute possibilité de primaire, au sein du PS et plus largement, avec le soutien de l’apparatchik Cambadélis et de manière tellement évidente que l’on se demande si beaucoup de gens de gauche et de médias qui croient encore que la hiérarchie élyséenne et solférinienne pourrait la laisser se dérouler sont réellement aussi naïfs… Bien entendu, on proclame partout que l’on souhaite une primaire, d’autant plus que l’on pense exactement l’inverse.
Plus le temps passe, moins l’organisation matérielle en sera possible, évidemment. Il est même probablement déjà trop tard, lorsque l’on voit la longueur du processus au sein de LR.
Ensuite, entretenir le flou sur le périmètre est le meilleur moyen d’assurer que les multiples chapelles de gauche discuteront à l’envi, au-delà même d’avril 2017… Les socialistes ne veulent pas trop l’élargir par peur d’une prise en otage par un candidat extérieur ; la gauche radicale ne veut pas de Hollande lui-même ; les écologistes sont divisés ; chacun a un avis sur l’électorat, sur les candidatures, sur les modalités, sur les engagements réciproques, sur les conséquences sur les candidatures du 1er tour de la présidentielle, etc. Cambadélis peut même se permettre de faire du zèle sur la participation, l’élargissement, l’organisation, car il sait que ce sera toujours inacceptable pour tel ou tel, chaque groupuscule ou candidat putatif en paralysant un autre. Et les distances idéologiques sont telles qu’aucune primaire marge de gauche n’est envisageable.
Ainsi, sous couvert de démocratie, de concertation, de débat, on gagne du temps, on s’assure que rien n’aura été décidé à l’automne, période qui sera ensevelie sous les débats de la primaire de droite et à laquelle il sera trop tard pour organiser quoi que ce soit de sérieux. C’est basique, mais cela fonctionne apparemment très bien.
D’ailleurs, la gauche radicale elle-même n’a pas forcément d’autres visées : Mélenchon n’a que faire des primaires ; les petits candidats potentiels ne veulent pas d’une primaire trop large qui les empêcheraient de gagner sur leur petit créneau.
En interne au PS, la volonté n’est pas forcément farouche non plus, même de la part des opposants à Hollande. Ce serait prendre le risque d’un fiasco: Mélenchon devant plusieurs candidats PS, un président sortant devancé par une candidature interne… du jamais vu.
3. En effet, qui d’autre qu’Aubry pourrait sérieusement contester le leadership hollandais ?
– Aubry serait la seule à disposer de l’assise électorale interne, de la légitimité historique et des réseaux nécessaires pour l’emporter sur Hollande. Mais elle n’en a plus envie. Elle est dans un mélange de velléité, d’orgueil et de rancœur, qui l’empêchent d’aller vraiment jusqu’au bout (sa candidature à la primaire de 2011 s’est faite à reculons et elle ne s’est vraiment investie que dans l’ultime débat de second tour contre Hollande : trop tard…), mais font qu’elle ne se reconnaît pas vraiment d’héritier et la motivent pour saboter le parcours des « camarades ». De surcroît, lorsqu’elle a été testée dans un sondage IFOP d’octobre 2014, elle était au même niveau qu’Hollande au 1er tour de la présidentielle, voire pire. Ses défaites successives aux départementales et aux régionales l’ont également fortement affaiblie.
– Valls s’est finalement banalisé en tant que Premier ministre et il a quasiment rejoint tous ses prédécesseurs dans les bas-fonds sondagiers. Dans les hypothèses où il est testé à la place de Hollande, il ne fait pas tellement mieux que lui (1 à 2 points d’écart en moyenne). A l’automne dernier, il a probablement raté une sortie du gouvernement à la Rocard (quand ce dernier avait pris –un véritable- prétexte en 1985 pour démissionner, refusant la proportionnelle aux législatives que le machiavélique Mitterrand mettait en place pour assurer un groupe FN à l’Assemblée et gêner la droite, ce qui avait presque totalement réussi). Il lui fallait trouver une bonne occasion, mais elle n’est pas venue. Pire, les attentats du 13 novembre 2015 l’ont contraint à rester, en plus sans que le virage sécuritaire lui profite réellement, étouffé qu’il est entre Hollande et Cazeneuve.
Le but de Valls est maintenant de tenter la prise du PS en 2017, après la défaite. Ce sera difficile. Sa base est faible même s’il a étoffé (un peu) ses réseaux. Il devra surtout tenter de récupérer une bonne partie des hollandais. Ce n’est pas impossible dans le cas des Sapin, Le Drian, Le Foll. C’est beaucoup moins sûr dans le cas des Cazeneuve, NVB, Le Roux, Feltesse, Dray, Cambadélis, soit qu’ils soient plus à gauche (Le Roux, Cambadélis) ou qu’ils veuillent tenter leur propre chance (NVB) ou qu’ils souhaitent déjà passer à Macron (Dray).
Ce dernier est évidemment gênant pour Valls dans la mesure où il lui vole son créneau du réformiste permanent, de la jeunesse et du renouveau. Mais, à terme, ce n’est pas forcément mauvais car cela peut lui permettre de se recentrer au sein du PS et d’occuper la même position que celle de Hollande en son temps. Il pourrait ainsi, au-delà d’anciens rocardiens, rallier d’anciens jospinistes, d’anciens strauss-kahniens de gauche et d’anciens royalistes. Il ne serait pas étonnant de voir Valls, pendant la campagne, si Hollande ne le fait pas suffisamment lui-même, se poser en conscience de gauche… Encore faut-il que Macron ne soit pas complètement externalisé du PS et qu’il reste à bonne distance.
– Macron s’inscrit en effet encore dans la gauche de gouvernement et il est justifié d’en dire quelques mots ici. Hollande, en le lançant, a voulu affaiblir Valls, en trouvant plus jeune et plus « perturbateur » que lui, et, dans un second temps, Juppé. Peut-être a-t-il voulu imiter Mitterrand lançant Tapie contre Rocard aux européennes de 1994 (avec un succès certain, puisque Rocard fut ainsi détruit avant la présidentielle de 1995). Mais, comme souvent, Hollande s’est emmêlé les pinceaux : en 1994, Mitterrand achevait son 2e mandat (et sa vie) et n’avait rien à craindre personnellement d’un effet boomerang de Tapie ; aujourd’hui, Hollande n’a rien à craindre de Valls, qui a raté l’occasion (si tant est qu’il en ait eu une) de partir avant de sombrer ; et l’électorat modéré recherchant l’efficacité et la réforme, qui l’avait soutenu en 2012, ne le soutiendra pas en 2017 seulement parce qu’il promettrait vaguement de placer Macron à Matignon.
Finalement, l’opération se retourne contre Hollande,
en brouillant l’image de l’action présidentielle et gouvernementale,
en agaçant toute la gauche, alors qu’Hollande a d’abord besoin de remobiliser son camp et non de penser prendre des voix au centre-droit, ce qui n’est probablement plus possible, vu le niveau de rejet même parmi ces électeurs-là,
en créant une nouvelle menace de candidature potentielle sur son flanc droit, alors qu’il ne peut se permettre de se retrouver coincé en tenaille entre Mélenchon et le centre ; il perd tout le bénéfice de la technique du « salami » appliquée à EELV et de la flatterie appliquée à Hulot, destinées à éviter une candidature au centre-gauche, et de l’innocuité supposée de Bayrou en 2017 (soit qu’il se retire en cas de candidature Juppé, libérant –selon l’espoir de Hollande- quelques points au centre-gauche ; soit qu’il se présente, prenant à Sarkozy davantage qu’il ne prendrait à Hollande).
Si, finalement, il prenait l’envie à Macron de prendre totalement son autonomie, de se présenter ou, en tous les cas, d’alimenter la chronique encore plus longuement que prévu, il y aurait ainsi le spectre d’un Bayrou jeune ou d’un Borloo à jeun, tous éléments évidemment défavorables à Hollande dans la perspective d’un premier tour « make or break ». La comparaison avec la créature du docteur Frankenstein est donc tout à fait pertinente (même si elle est évidemment très exagérée : cette pauvre créature est quand même beaucoup moins froide et carnassière que Macron 😀 ).
Hollande doit désormais parvenir à le liquider sans en faire un martyr (ce que Macron cherche manifestement) : il ne peut l’éjecter du gouvernement trop vite. Peut-être que s’appuyer sur Valls, le plus menacé par Macron à moyen terme, constituera la solution. Laisser Macron présenter un projet de loi dans lequel il s’enlisera et se dévalorisera ? Ou le « promouvoir » à un poste ministériel en réalité plus exposé ? Le pousser à partir mais dans de mauvaises conditions, en s’assurant qu’aucun parlementaire ne le suivra, afin de lui assurer une destinée à la Villepin ? Mais Macron pourrait lui aussi chercher une sortie à la Rocard 1985.
Toutefois, le destin Villepin 2011 est le plus probable, car le phénomène Macron est largement factice. C’est bien entendu le candidat idéal du « système » médiatique et capitalistique dominant : libéral en économie, libéral sur le plan sociétal, sans aucun tabou, riche, jeune et télégénique. Mais son succès tient largement aux électeurs du centre et de droite, un peu à la manière de Kouchner en son temps (ou de Veil à l’égard du bord opposé). Jamais un Kouchner ou une Veil n’ont réussi à s’imposer nationalement. Et Villepin n’a eu ses moments de gloire en 2011 que parce que les médias (Canal+ l’invitant à répétition, sûrement pour gêner Sarkozy, mais quand même…) et certains bobos riches s’étaient entichés de lui.
C’est de toute façon trop tôt pour Macron. Si certains sondages ont pu le placer assez haut parmi les candidats alternatifs de gauche, ce n’est qu’auprès de l’ensemble des Français (ce qui n’a pas de sens) ou, à gauche, en proposant à la fois Aubry, Hidalgo, Montebourg, voire Hamon (ce qui n’a pas davantage de sens : l’aile gauche ne serait jamais aussi divisée).
– Hidalgo, justement, n’est évidemment pas mûre pour être en première ligne cette fois-ci (sur le fond, elle ne le sera jamais :p : je m’exprime ici du simple point de vue tactique et électoral !). Mais elle est clairement en position de reprendre l’aile gauche du PS dès le lendemain de la défaite de 2017. Et donc peut-être le parti lui-même si les non-aubrystes ne se coalisent pas.
Elle a le bénéfice de la place forte parisienne, aujourd’hui plus à gauche que les vieux bastions populaires et seule vraie victoire locale depuis 2012 (avec la consolidation de Collomb à Lyon)… Elle a le bénéfice d’un soutien assez général du courant aubryste, auprès duquel Hamon n’a pas cherché ou réussi à s’imposer. Elle se positionne de manière presque caricaturale en libertaire sociétale et en socialiste vieux jeu sur le plan économique : un mélange évidemment gagnant en interne au PS (et à l’ensemble de la gauche, d’ailleurs). Elle est une femme et elle est d’origine étrangère : fantastique sur le plan symbolique. Son mari, Jean-Marc Germain, ancien collaborateur d’Aubry, est un des chefs des frondeurs et lui assurera le soutien de ces derniers : comme chez EELV, on n’est jamais mieux servi qu’en faisant de la politique en couple (Cosse-Baupin, Sas-Canfin, Placé-Duflot, Placé-Sas, etc.) et MAM et POM sont des petits joueurs !
Bref, un affrontement Hidalgo-Valls se profile probablement à la tête du PS. Peut-être un remake du congrès de Reims de 2008 entre Aubry et Royal (avec Hidalgo et Valls aux premières loges dans chaque camp, d’ailleurs). Toujours est-il que ceux-là ne prendront pas le risque de s’abîmer prématurément à tenter de remplacer Hollande: qu’il perde seul et solde la période pour mieux repartir en 2022…
– Hamon aurait pu être le grand espoir de l’aile gauche, mais il a mal manœuvré. Comme Peillon en son temps, il est difficile d’en déterminer les raisons exactes. Faible sens tactique ? Problèmes de personnalité ? Espérance erronée dans une transmission de sceptre de la part de l’acariâtre et bornée Aubry ? Toujours est-il que le fantasque Montebourg l’a emporté dans son « ailleurs » et qu’il ne s’en est pas relevé. Même s’il était resté au gouvernement, la position de ministre de l’Education nationale n’aurait cependant pas été favorable pour la suite d’une carrière politique.
Son tour semble passé, mais peut-être trouvera-t-il quelque possibilité d’alliance avec Valls pour écarter Hidalgo, comme il l’a fait pour écarter Ayrault en 2013-14. Cela reste acrobatique.
– Montebourg est trop inconstant. A-t-il d’ailleurs réellement envie de mener une campagne présidentielle ? C’est peu probable. Il n’a jamais structuré de courant et n’a fait que surfer sur son relatif succès à la primaire de 2011. Il commence en outre de ne plus vraiment incarner le renouveau. Il n’aurait une utilité que si Hollande décidait de le rappeler au gouvernement pour tenter de faire de l’ombre à Mélenchon : mais que de couacs en perspective pour un résultat tout sauf assuré…
– Fabius et Delanoë sont désormais retirés, leurs troupes s’éparpillant vers Hollande et Aubry. Peillon a abandonné. Moscovici a trouvé sa sinécure pour quelques temps encore. Bartolone s’est « grillé » avec sa campagne régionale. Vallaud-Belkacem est trop jeune et trop prudemment ambitieuse pour se dilapider prématurément (elle n’aurait de toute façon pas l’assise interne suffisante, n’étant pour le moment qu’une personnalité de second rang).
Même s’il y avait contestation de son leadership, Hollande parviendrait à s’imposer, par réflexe légitimiste et par organisation d’une primaire moins « ouverte » et « citoyenne » que ne le prévoient les statuts (en clair, un tranquille vote interne de ratification auprès du reste d’adhérents que comptent le parti et le PRG, plus une ou deux officines à la Bennahmias, à la Placé ou à la Hue). Certes, il serait affaibli, comme Ford par Reagan en 1976, Carter par Ted Kennedy en 1980 ou Bush Sr par Buchanan (repris par Perot, en quelque sorte) en 1992, mais il finirait par être le candidat officiel. Même les demi-sortants Gore et Bush Sr l’avaient emporté sur Bradley en 2000 et Dole et Robertson en 1988. Seul LBJ avait dû renoncer en 1968, mais le bourbier vietnamien était quand même une circonstance très particulière et RFK un opposant autrement brillant que les noms que nous venons d’égrener.
4. Quant à la gauche au sens large, l’effacement de l’extrême-gauche trotskyste, orpheline de ses vedettes Laguiller et Besancenot, l’émiettement de la gauche radicale derrière un Mélenchon désormais banalisé et qui est un moindre mal pour Hollande, et les déchirements des Verts assurent à Hollande une situation moins problématique qu’il ne pouvait le craindre au regard de son affaiblissement inégalé. Nous reviendrons sur la gauche de la gauche et sur les écologistes, mais évoquons quand même ces forces politiques, du seul point de vue hollandais.
Il a parfaitement mené l’opération « salami » sur EELV, tel Staline et Jdanov à la fin des années 1940 dans les pays d’Europe de l’Est, découpant progressivement les autres partis pour renforcer progressivement le PC local et lui faire prendre insensiblement tous les leviers du pouvoir. Aujourd’hui, Hollande applique le même principe à EELV pour rallier (faussement) les élites du parti moyennant quelques menus postes. Hollande n’a même pas besoin que se reconstitue un parti écologiste modéré et le chaos actuel lui convient parfaitement : Cosse, Baupin et Pompili n’ont pas rejoint Rugy, Placé et Bennahmias et restent dans un entre-deux ; il ya quasiment autant de structures que de personnes…. Le PS n’a même plus la nécessité tactique de s’embêter à assurer un groupe parlementaire auxdits cadres ; certains suivront sûrement le chemin de Filippetti en se fondant dans le PS ; mais les convertis de fraîche date sont souvent les soldats les plus ardents… Cela évite aussi qu’une structure efficace soit disponible pour Hulot.
Concernant ce dernier, Hollande a fait tout ce qu’il a pu pour le réduire. Il y est presque parvenu et, si le danger n’est pas complètement écarté, il est suffisamment amoindri pour qu’en cas de décision de Hulot d’y aller quand même, la bulle explose rapidement, selon un schéma bien connu pour les candidatures « autres » (Bové, Coluche, CPNT,…) ou les carrières issues de la « société civile » (Tapie, Kouchner, Schwartzenberg, Breton, Mer et tant d’autres). De ce point de vue, le calcul tactique de Hollande est juste.
Plus largement, le président sortant tentera peut-être d’appliquer la technique du « salami » à la gauche de la gauche. La promesse de circonscriptions législatives permettra peut-être de détacher le PCF de Mélenchon.
De son côté, la « belle alliance populaire » (que l’on me permette un ROFLMAO) a, elle, pour objectif de diluer au maximum les autres candidats de gauche ou de les rapprocher de manière factice pour qu’ils s’entre-déchirent et s’annulent d’autant plus. Ce concept de « dépassement » du PS qu’avait avancé Cambadélis découlait d’une volonté initiale de recréer la France Unie du Mitterrand de 1988. Hollande étant très loin de ce modèle, a minima, le « dépassement » du PS doit servir à brouiller les cartes autour de lui, de manière à ce que la dispersion ne l’atteigne pas directement. Car dispersion vaut disparition, selon son théorème forgé à la lumière (évidente) de la débâcle de 2002.
5. A l’égard de Bayrou, si l’on peut en partie l’inclure dans le champ de la gauche au sens où une bonne partie du MoDem croupion est en réalité un électorat de centre-gauche (le centre-droit étant parti avec la création de l’UDI), Hollande ne peut pratiquer l’attraction-étouffement.
C’est d’abord trop tard. Il a probablement raté une occasion en début de septennat de l’inclure dans sa majorité (un poste de Garde des Sceaux lui aurait suffi). Bayrou s’est éloigné et, même si Hollande aurait encore pu flatter son orgueil à l’occasion de l’arrivée de Valls, les élections locales et la pesanteur des quelques élus dont dispose encore le MoDem l’ont fait rebasculer vers les alliances avec l’UDI et LR.
De toute façon (et c’est peut-être ce que Hollande avait en fait en tête dès 2012), Bayrou peut avoir son utilité en cas de candidature Sarkozy ou de candidatures Le Maire ou Fillon droitisées par l’épreuve de la primaire : il doit gagner au moins autant de voix à droite qu’à gauche. Cela apparaît cependant un calcul bien illusoire, car Bayrou constitue un exutoire supplémentaire (en dehors du candidat écologiste, surtout si c’est Hulot) pour les socialistes déçus, notamment enseignants et fonctionnaires.
Quant aux candidatures éventuelles du pôle centriste-citoyen, avec Corinne Lepage et alii, elles ne seraient que de témoignage et ne passeraient peut-être pas l’obstacle des 500 signatures. L’inquiétude hollandaise à ce sujet est donc modérée.
Au total, ainsi que je l’avais déjà noté, Hollande a, comme Merkel, réussi à éviter l’émergence de concurrents sérieux dans son camp. Son problème est qu’elle a par ailleurs réussi à préserver un 35 % alors qu’il peine à se maintenir à 15 %… Même en tactique électorale, il est déclassé !